Biologie des Scarabées
Une tendance générale : la saprophagie
La saprophagie est un comportement alimentaire consistant
en l'ingestion de matières organiques en décomposition.
L'ensemble des taxons traités dans ce site sont saprophages au stade
de larve et/ou d'adulte. Cependant tous ne mangent pas les même matières
organiques :
- certains adultes se contentent de matières végétales
en décomposition (Psammoporus),
- d'autres sont plutôt liés aux champignons (Bolbelasmus),
- la grande majorité consomment des matières fécales
: ce sont les coprophages.
Certains sont moins stricts et possèdent un régime varié (Anoplotrupes).
Les études menées sur la complexité des comportements et l'évolution des espèces tendent à caractériser la coprophagie comme une adaptation plus récente, et souvent beaucoup plus complexe, de la saprophagie, elle même étant un dérivé de la phytophagie.
Les comportements des coprophages
Face aux particularités de la
ressource (cf. la bouse) et aux nombreux concurrents
se la partageant, les espèces ont développé des stratégies
comportementales originales.
Le premier problème qui leur est posé vient de la répartition
aléatoire, fragmentée de cette ressource (les scientifiques
parlent d'habitat en patch).
Point commun, la grande majorité sont ailés et possèdent
de très bons détecteurs d'odeurs (antennes, palpes) : c'est
donc en humant le vent, puis en le remontant, qu'ils retrouvent les excréments.
Peu doués pour l'abousissage, ils se laissent généralement
choir à quelque distance et finissent le chemin sur leurs six pattes.
Les endocoprides (= "dans la bouse")
doivent considèrer la bouse comme un paradis : les adultes y trouvent
à manger et des partenaires pour se reproduire. Une fois leur fonctions
vitales accomplies, il leur est fréquent de s'enfoncer de quelques
millimètres dans la terre juste sous la bouse... avant que la faim
ou des gonades ne les fassent repartir ! Les femelles pondent leurs oeufs
dans la masse même et les laissent se développer. Ceux-ci bénéficient
d'une humidité et d'une température garantie quelques temps,
avant qu'ils n'éclosent. Les larves n'ont alors plus qu'à se
régaler de tout ce festin qui les entoure. Puis elles iront s'enterrer,
généralement pendant la période froide, avant de se nymphoser
les beaux jours revenus.
Ce sont principalement les Aphodiinae.
Les hypocoprides ou tunnelliers ont un comportement
en peu plus complexe que les précédents. Lorsqu'ils ont trouvé
un excrément à leur convenance, ils creusent une galerie (d'une
dizaine de centimètre de profondeur, mais qui peut atteindre plus d'un
mètre chez Typhaeus) au fond de laquelle ils entasseront après
d'incessants allez-retours une réserve de matière fécale
dans laquelle la femelle aura pondu son oeuf. La forme de cette réserve
s'adapte à la forme de la galerie : les Geotrupidae feront des boudins
allongés alors que les galeries de la majorité des Onthophages
(Coprinae) se ramifient et se terminent par une huitaine de petites chambres
(cf dessin de la page d'accueil), chacune contenant
une boulette ne portant qu'un oeuf. Le forage de la galerie est généralement
l'oeuvre du couple.
Ces moeurs représentent l'ébauche d'une coopération familiale
et d'un soin aux jeunes (qui se limite à de l'attention pour l'emplacement
des oeufs).
Les piluliers développent les comportements les plus complexes. Arrivés sur l'excrément, ils faconnent à l'aide de leurs pattes et de leur tête une boule de matière fécale au moins aussi grosse qu'eux. Cette boule, enfouie sur place par les Copris, est plus généralement roulée au loin (Scarabaeinae). Elle sera alors enfouie dans une chambre au fond d'une galerie. Notons au passage l'apparition de comportements d'offrande... et de vol !
Cette pilule sera alors remaniée, parfois divisée en deux, souvent modelée en forme de poire, pour y héberger un oeuf unique. La larve s'y développera à l'intérieur, pendant qu'à l'extérieur la mère préserve la pilule de toute agression (surtout des moisissures).
Remarquons l'évolution de la stratégie de reproduction au travers de ces comportements, qui vont d'un investissement maximum dans le nombre d'oeufs, sans leur procurer de soin particulier, à un investissement maximum dans le soin aux oeufs (éloignement, enfouissement, surveillance) mais pour seulement un oeuf ou deux.
Des comportements en compétition
Ces trois types de comportements se retrouvent en compétition : imaginons une seule bouse assaillie par quelques dizaines d'Aphodius endocoprides, d'Onthophagus tunelliers et de Scarabaeus piluliers... ces deux derniers auront tôt fait d'enfouir (plus ou moins loin) l'intégralité de l'immondice, laissant les Aphodius sur le gazon... Ainsi une bouse d'éléphant de quelques kilos disparait dans la savane en quelques heures! Heureusement pour nos Aphodius, Scarabaeus et ses cousins ne se sentent à l'aise que lorsqu'il fait vraiment chaud : ceux-ci ne se trouveront donc qu'en pays de soleil (région méditerranéenne chez nous) où il domineront les peuplements. Dans les régions plus fraiches, se seront par contre les Aphodiinae, plus tolérants aux basses températures, qui constitueront la majorité des peuplements.